Né le 26 mars 1905 à Anvers (Belgique) - décédé le 3 juin 1967 à Neuilly-sur-Seine (France)
André Cluytens est un chef d’orchestre français d’origine belge.
Son père, Alfons Cluytens, était directeur d'opéra et chef d'orchestre à Anvers, sa mère cantatrice. Le jeune Augustin (futur André) effectue ses études au Conservatoire royal d'Anvers, devient chef de chœur dans sa ville natale et pense s’orienter vers une carrière de pianiste, répétiteur et chef de chant à l'opéra. Ses racines sont flamandes mais il est attiré par la culture française. Dès 1926, il épouse une jeune cantatrice du Théâtre royal français. En 1927, en remplacement de son père, il est amené à diriger les Pêcheurs de perles de Bizet et s’oriente alors vers la carrière de chef d’orchestre. Il donne la création belge de Salomé de Richard Strauss. Cluytens vient en France à partir de 1932 et dirige au théâtre du Capitole de Toulouse, à l’opéra de Lyon, à Bordeaux et Vichy…
Naturalisé français dès 1939 (quelques semaines avant le début de la guerre), c'est à cette occasion qu'il adopte le prénom d'André. Sa carrière rapide pendant le régime de Vichy et l'occupation le rendent suspect à la Libération. Il est blanchi le 24 mai 1946. Directeur du Théâtre national de l'Opéra comique de 1946 à 1953, il dirige l’orchestre de la Société des concerts du Conservatoire dès 1942 et s'y produit régulièrement à partir de 1946, en particulier lors de tournées en France et à l’étranger. Cluytens succède en 1949 à Charles Munch (parti aux États-Unis) au poste de vice-président chef d’orchestre. L'intransigeance du nouveau patron irrite d'abord les musiciens : intraitable sur le nombre de répétitions et la présence continue des instrumentistes qui avaient l'habitude de cachetonner dans d'autres orchestres . Mais les résultats sont là et l'orchestre lui sera fidèle jusqu'à la fin . Il dirige également au théâtre national de l’Opéra, notamment Tannhäuser (1963) et Salomé (1964), avec Anja Silja, dans les mises en scène de Wieland Wagner. Dans les années 1950, il dirige très régulièrement l’orchestre national de la RDF puis de la RTF, en particulier lors de tournées en Allemagne en 1957, en Union soviétique en 1959 et au Moyen-Orient et en Europe orientale en 1960.
Animant le centre musical de la France, il est appelé à la tête des orchestres les plus prestigieux d'Europe et du monde. Cluytens se produit régulièrement à la tête de l'Orchestre philharmonique de Berlin de 1952 à 1966 tant pour le disque que le concert. Mais ce sont les hauts lieux de l'opéra européen qui lui donnent la consécration suprême : Bayreuth, Vienne (où il débute avec Tristan), Milan (La Scala lui confie la Tétralogie)…
En 1955, il est le premier chef français à se produire au festival de Bayreuth, où il dirige Tannhäuser, remplaçant au pied levé Eugen Jochum. Il reviendra à Bayreuth les années suivantes, dirigeant Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg de 1956 à 1958 dans la célèbre mise en scène de Wieland Wagner typique du nouveau Bayreuth, Parsifal en 1957, et Lohengrin en 1958, également à l’occasion d’une nouvelle mise en scène de Wieland Wagner. L’enthousiasme du public dès 1955 permet à Cluytens de revenir saluer seul, ce qu’une tradition prohibait à Bayreuth.
En 1956, il codirige avec Carl Schuricht la première tournée de l’orchestre philharmonique de Vienne aux États-Unis, deux ans après la disparition de Wilhelm Furtwängler et un an après celle d’Erich Kleiber qui devait initialement diriger la tournée. Le public américain se montre très réservé en raison de l’attitude de l’Autriche avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. En novembre 1957, il dirige un cycle de concerts à la tête de l’orchestre philharmonique de New York, et dirige à cette occasion la Première Symphonie d’Henri Dutilleux. Ce cycle de concerts a été radiodiffusé par CBS. Entre 1957 et 1960, il enregistre avec l’orchestre philharmonique de Berlin une intégrale des symphonies de Beethoven, la première dirigée par un chef français et la première interprétée en studio par un orchestre germanique.
En 1960, Cluytens revient en Belgique : il est nommé directeur de l’orchestre national de Belgique, qui est alors réorganisé pour devenir l’orchestre officiel de la capitale belge. Le Maître consacre alors une grande partie de son temps à l'orchestre qu'il porte à un niveau international et emmène en tournée en Europe et dans le monde. Cluytens conserve néanmoins des liens privilégiés avec l’orchestre de la Société des concerts du Conservatoire, qu’il dirige lors d’une série de concerts au Japon en avril et mai 1964 – l’ultime tournée de l’orchestre – et lors d’un cycle consacré à Beethoven au théâtre des Champs-Élysées à l’automne 1964 et avec lequel il continue à enregistrer Ravel, Debussy, Roussel, Berlioz…
Cluytens retourne au festival de Bayreuth en 1965 pour diriger Parsifal, où il succède à Hans Knappertsbusch sur la recommandation de ce dernier, et Tannhäuser. Fait sans précédent à Bayreuth, le public applaudit entre les actes de Parsifal !
Atteint par la maladie durant l’hiver 1965–1966, il doit arrêter de diriger une première fois. Le cancer remonte vraisemblablement au début des années 1960 : première alerte en 1961 aux États-Unis alors qu'il dirige l'orchestre symphonique de Chicago (festival de Ravinia). Il peut remonter au pupitre en septembre 1966. La maladie interrompt définitivement son activité en avril 1967 (dernier concert à Stuttgart le 25 avril 1967 à la tête de l'Orchestre National de Belgique : le concert se termine par Les tableaux d'une exposition… la critique allemande, enthousiaste, parle d'un véritable pandémonium sonore). Il devait faire ses débuts au Metropolitan Opera de New York peu de temps après…
Cluytens meurt le 3 juin 1967, à l’âge de soixante-deux ans. Il habitait dans le Val d'Oise, à Montmorency, où il est enterré avec sa femme Germaine et son fils unique, Michel décédé en 1969 dans un accident de voiture.
Courtois et souriant, adoré des musiciens d'orchestre qu'il respecte naturellement et dont il connaît le métier depuis sa toute première jeunesse, Cluytens est continuellement à la recherche de perfection et d'indépendance dans son art. Il inspire une confiance et une admiration, souvent émues, aux instrumentistes et chanteurs innombrables et prestigieux qui ont fait de la musique avec lui. Wolfgang Windgassen lui déclare après avoir chanté Tannhäuser sous sa direction à Bayreuth en 1955 : « Avec vous, je chanterai tout Siegfried sans répétition… »
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