Marilyn Berneice Horne est née le 16 janvier 1934 à Bradford en Pennsylvanie. Son père, Bentz Horne, ténor dans une chorale religieuse, lui prodigue ses premières leçons de chant.
Elle se perfectionne avec Hazel Bittenbender et Edna Luce avant d’intégrer la classe de chant de l’Université de Californie du Sud dirigée par William Vennard. Elle prit aussi des cours auprès de la mythique Lotte Lehmann.
L’été 1954, elle est la doublure vocale de l’actrice Dorothy Dandridge dans l’enregistrement de Carmen Jones, la version signée par Oscar Hammerstein du chef-d’œuvre de Bizet devenue un film important d'Otto Preminger.
Fin 1954, elle fait donc ses débuts scéniques dans des rôle de soprano, Hata de La fiancée vendue et Hansel d’Humperdinck sous l’égide du Los Angeles Guild Opera. Mais elle chante aussi, très vite, un rôle de mezzo, celui de Cenerentola. Le grand compositeur Igor Stravinsky, qui réside alors en Californie, remarque son talent et lui obtient un engagement à Venise où elle chante en 1956 des madrigaux de Monteverdi et de Schütz sous la direction de Robert Craft.
C’est à cette époque qu’elle fait connaissance avec le chef d’orchestre Henry Lewis qui la dirige dans Santuzza. Le 1 juillet 1960, elle se marie avec lui. Ensemble, ils auront une fille Angela, née le 14 juin 1965. On sait que cette grossesse l’empêchera d’honorer un contrat au Carnegie Hall, le 22 avril 1965, ce qui permet à une certaine Montserrat Caballé de triompher dans Lucrezia Borgia et de devenir star en l’espace d’une soirée.
En 1956, à la suite du décès de son père, elle part pour l’Europe et obtient un engagement dans la troupe de l’Opéra de Gelsenkirchen en tant que soprano. Elle y interprète des personnages aussi divers que Mimi de La Bohème, Giulietta des Contes d’Hoffman, Amelia de Simon Boccanegra ou Fulvia de l’Ezio de Haendel.
Elle triomphe aussi dans le rôle de Marie du Wozzeck de Berg lors du gala d’inauguration de la nouvelle salle de l’Opéra de Gelsenkirchen le 22 mai 1960 en présence de la presse qui lui tresse des lauriers.
C’est grâce à ce succès qu’on pense à elle à l’Opéra de San Francisco pour remplacer Brenda Lewis dans ce rôle. Peu de temps après, le 21 février 1961, elle triomphe à New-York dans une rareté, Beatrice di Tenda, aux côtés de celle qui va devenir sa partenaire de prédilection Joan Sutherland.
Peu de temps après ses débuts aussi inattendus que fracassants, elle chante Carmen à Philadelphie avec Franco Corelli (avril 1962) avant de retrouver San Francisco aux côtés d’un autre ténor star, Mario Del Monaco dans Pagliacci en octobre de la même année.
Le 29 janvier 1964, à Los Angeles, elle débute dans Arsace face à l’époustouflante Sémiramis de Joan Sutherland. Cette soirée marque un tournant décisif dans son évolution artistique car jusque là elle n’avait jamais utilisé son registre grave en force de peur de « perdre sa voix ». Et l’on sait que c’est grâce à son aisance confondante dans l’agilità di forza propre aux grands opéras serie de Rossini qu’elle s’est rendue unique.
Cette année cruciale pour sa carrière la voit aussi revenir en Europe avec les honneurs puisqu’elle fait son entrée à Covent Garden dans Marie de Berg avant d’être l’invitée du prestigieux festival d’Edimbourg où elle interprète Les nuits d ‘été sous la baguette d’un grand chef berliozien, Charles Munch.
Tout en élargissant sans cesse son répertoire, elle reste fidèle au Bel canto dont elle devient une grande-prêtresse. Elle aborde Anna Bolena à Carnegie Hall en novembre 1966 ; la fulgurante Elena Souliotis chante le rôle-titre et le jeune ténor de la distribution s’appelle Placido Domingo.
En 1968 et 1969, elle fait la conquête de l’Italie. Elle est d’abord Rosina de Rossini pour le Mai Musical florentin en juin 1968 avec Alfredo Kraus en Almaviva avant de se montrer incandescente dans deux grands opéras de Berlioz La Damnation de Faust et Les Troyenssous la direction de Georges Prêtre.
Le 13 mars 1969 elle foule pour la première fois les planches de la Scala de Milan dans l’oratorio de son cher Stravinsky Oedipus Rex dirigé par Abbado. Pier Luigi Pizzi, dans une période d’inspiration avant-gardiste, lui dessine un costume de Jocaste ovoïde, assez étrange et mal-commode. Elle y sera beaucoup plus à l’aise, un mois plus tard, dans l’une des premières reprises modernes de L’Assedio di Corinto où elle campe un Neocles étourdissant.
Elle ressuscite, toujours en Italie, toujours pour la RAI, toujours aux côtés du sublime Nicolaï Gedda, un rôle resté sans véritable titulaire depuis des lustres et qu’elle rend à ses fastes, celui de Fidès dans Le Prophète de Meyerbeer (juillet 1970)
Au printemps, elle avait connu la consécration en faisant sa première apparition sur la scène du Met de New-York. Elle y chantait avec ardeur Adalgise aux côtés de sa Norma favorite. Joan Sutherland, de Carlo Bergonzi et de Cesare Siepi. Un carré d’as, assurément.
En 1971, elle retrouve Turin pour sa première Iphigénie en Tauride de Gluck dont elle chantera quelques années plus tard Orphée dans la version révisée par Berlioz à la démesure de Pauline Viardot.
En 1977, elle est à Houston où elle irradie de talent dans Tancrède, une prise de rôle étincelante suivie d’une autre, considérable, dans l’Orlando de Vivaldi rendu aux vertiges épiques de l’Arioste. C’était en 1978 à Vérone, au Teatro Filarmonico, dans l’écrin fastueux de la scénographie d’un Pier Luigi Pizzi au plus haut de son inspiration.
Les années 80 marquent une apogée. En 1980, elle est à Aix aux côtés de Caballé pour une Semiramide superbement stylisée par Pizzi qui consacre Samuel Ramey et rentre d’emblée dans la légende. En 1981 le magazine Opera News la sacre "probably the greatest singer in the world". Elle vole de triomphes en triomphes et aborde avec le plus ébouriffant panache de nouveaux rôles de Rossini : Faliero et Andromaca (dans Ermione) , au festival de Pesaro, font délirer le public d’enthousiasme.
Unique dans l’art de rendre leur éclat auroral aux joyaux du baroque le plus flamboyant, Horne atteint au sublime dans le rôle-titre de Rinaldo, le premier opéra de Haendel jamais programmé sur la scène du Met de New-York, en 1984. Elle retrouve Haendel et Orlando l’année suivante dans la cité des Doges puis à Chicago avec le même bonheur.
La décennie suivante la voit rentrer dans l’automne de sa carrière. Fin 1990 elle offre à New-York un ultime Arsace avant de participer sur cette même scène du Metropolitan à la création mondiale des Ghosts of Versailles de Corigliano où elle compose une Selima irrésistiblement cocasse. En 1993, elle chante sa dernière Italiana in Algeri à Londres. Elle se borne alors au concert dans des programmes fort éclectiques.
En 1998, elle entreprend une tournée d’adieux qui passe par Londres, Paris et Barcelone. Elle chante, dans son arbre généalogique, un large éventail de songs. Le 28 novembre 1999 elle donne son dernier récital classique au Chicago Symphony Center.
|